La Bête – Une dystopie en dédale mental où l’émotion est menacée !

La Bête | Ad Vitam

La Bête – Dans un futur proche où règne l’intelligence artificielle, les émotions humaines sont devenues une menace. Pour s’en débarrasser, Gabrielle doit purifier son ADN en replongeant dans ses vies antérieures. Elle y retrouve Louis, son grand amour. Mais une peur l’envahit, le pressentiment qu’une catastrophe se prépare.

Avis Global

Note : 3.5 sur 5.

C’est donc une adaptation assez libre qui marque le retour de Bertrand Bonello sur nos grands écrans ! Le réalisateur de « Nocturama » ou encore de « Saint Laurent », avec le regretté Gaspard Ulliel (qui devait jouer aux côtés de Léa Seydoux), puise dans le roman « La Bête dans la Jungle » de Henry James et nous entraîne dans une histoire d’amour à travers les âges. Ici, Bonello aborde les thèmes de l’intelligence artificielle, la question des émotions, de la définition de l’humain… En nous entraînant dans un récit sur trois époques, avec un duo qui se retrouve et s’éloigne. Mais est-ce un métrage aussi troublant que puissant ? Ou un dédale qui perd son spectateur ? Ce film dramatique français est sorti en salles le mercredi 07 Février 2024 !

« La Bête » est un dédale dense, lorgnant à la frontière de plusieurs genres, et nous plongeant dans un récit complexe, noir, et à l’esthétisme troublant ! Avec un duo principal qui nous emporte par une subtilité de jeu aussi douce que cruelle dans le fond, chacun s’attire pour ne jamais s’accomplir. Une catastrophe pointe le bout de son nez, mais quelle est-elle au final ? Porté par une mise en scène efficace, qui empile les genres, condense les images, fait naître une angoisse latente, une noirceur insidieuse. Cependant, le moule craque quand Bonello mélange trop, ou qu’il théorise jusqu’à l’épuisement.

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Un film à la croisée des genres !

Au fil du métrage, on comprend rapidement que les époques viendront explorer un genre cinématographique propre, que ce soit en plongeant dans le film d’époque, ou lorgnant vers un trip proche de David Lynch, ou de David Cronenberg… Bonello s’amuse une fois de plus avec sa mise en scène, et expérimente encore ici, dans une quête de l’image incessante. C’est une dystopie où l’angoisse est diffusée au travers de chaque plan. Que ce soit en 1910 ou en 2044, quelque chose rôde, une angoisse prend à la gorge nos personnages. Un peu comme une longue expérimentation visuelle, à l’image de cette scène d’introduction ultra puissante ! Un fond vert, une actrice, et des directions dans un environnement vide pour terminer sur un glitch. Voilà ici, tout un condensé du métrage et de sa mise en scène, venir empiler des parallèles entre ses époques, mais aussi venir rencontrer ses personnages.

C’est une chose fascinante dans le métrage, sa maîtrise technique, comme sa capacité à nous faire tomber dans un tourbillon où la théorie rencontre les angoisses du réalisateur. Car en adaptant assez librement son matériel d’origine, Bonello plonge dans ce qui semble l’effrayer : l’effacement des émotions au profit de la technologie. Au-delà d’une histoire d’amour à travers les époques, c’est un questionnement qui bouillonne. Que se passe-t-il quand l’émotion disparaît ? Serons-nous si différent de ce fantasme technologique qui traverse notre époque ? C’est en nous plongeant dans un récit où ces deux personnages s’attirent, mais vont représenter des figures différentes, que le tout prend une force qui se disperse tout au long du récit. Peut-être le plus intéressant dans tout ça, c’est l’émotion presque imperceptible entre Gabrielle et Louis. Deux mondes se rencontrent à travers ces personnages, et leur relation sert davantage de tremplin aux thèmes du film !

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Une interprétation fine…

Au milieu de ce dédale, entre les différents genres, les questionnements… Eh bien, nous retrouvons un duo d’acteurs fascinants ! En particulier la belle Léa Seydoux, qui livre ici, certainement l’une de ses meilleures performances ! En plongeant dans ses vies antérieures pour « purifier » son ADN. C’est le dilemme de son humanité qui est en jeu, la sienne et celle de Louis, son ami, amant, mais jamais compagnon amoureux. C’est un duo qui se tourne autour, se repousse, s’attire, mais qui ne passera jamais le cap… Ou peut-être trop tard ? Bien que cette relation ne semble pas être le centre d’intérêt principal de Bonello, il servira à transposer les idées et thématiques du réalisateur !

Et on ne pourra pas nier que les idées et théorisations sont nombreuses dans ce film, peut-être un peu trop ? Le réalisateur a toujours aimé transformer ses métrages en objets métaphoriques, celui-ci ne fait pas exception. En venant multiplier les influences, les registres, les idées… Le réalisateur vient superposer les images, les arcs narratifs, sans jamais vraiment réussir à lier le tout. Une œuvre qui expose toute sa théorisation, pouvant la rendre aussi fascinante qu’inaccessible. Car si le métrage porte tout son intérêt, il porte aussi une densité qui laisse de marbre ! Dans son enchevêtrement, son certain fatalisme, le métrage en déroutera plus d’un. En faisant un métrage théorique fascinant, comme inaccessible, le réalisateur peut parfois se perdre quelque peu dans son déroulé.

Souffrant de longueurs, d’une certaine inertie imposée par sa durée, on pourrait se lasser d’un métrage parfois trop étiré. Mais si le réalisateur s’enlise par instants, le métrage, nous captive, notamment grâce à des scènes qui trouble ou enivre ! Que ce soit une scène sous l’eau magistrale, ou encore un rendez-vous dans une boîte de nuit qui nous glacera le sang.

La Bête | Ad Vitam
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Mais au final, on passe ? Ou on fonce ?

Bertrand Bonello nous livre une œuvre fascinante avec « La Bête » ! En allant au-delà du récit sur l’impasse amoureuse, le réalisateur nous plonge dans une dystopie où l’angoisse est infusée tout le long ! En nous plongeant dans une expérience à la croisée des genres et des influences, le film nous emporte avec une grande maîtrise dans un dédale mental efficace. Porté par un duo brillant, en particulier une Léa Seydoux, qui parvient à un être la source de fascination, ou encore de subversion du récit.

Dans cette œuvre, dense, parfois complexe. Nous allons suivre à un réalisateur qui pousse encore plus loin l’expérimentation de son cinéma. Mais qui parvient également à adapter habilement pour y infuser ses craintes personnelles, afin de livrer une réflexion personnelle sur la perte des émotions. Une proposition qui nous emporte dans un labyrinthe expérimental, angoissant, parfois sensoriel… Aussi captivant que déroutant ! En nous portant à travers les époques, Bonello déroule tout son concept à l’extrême, pour livrer un certain fatalisme qui pourra refroidir certains. Mais le réalisateur nous livre ici, un film intelligent, bien que pouvant apparaître difficile d’accès. Un drame romanesque, parfois romantique, souvent psychologique… Un objet de cinéma à disséquer pour mieux le comprendre !

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