Les Feuilles mortes – Le cœur chaud dans un monde froid

Les Feuilles mortes | Jussi Vatanen , Alma Poysti | Diaphana Distribution

Les Feuilles mortes : Deux personnes solitaires se rencontrent par hasard une nuit à Helsinki et chacun tente de trouver en l’autre son premier, unique et dernier amour. Mais la vie a tendance à mettre des obstacles sur la route de ceux qui cherchent le bonheur.

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LES FEUILLES MORTES

Note : 4 sur 5.

La puissance de l’amour est telle qu’il est quasiment impossible de totalement l’abandonner. Alors qu’il avait annoncé sa retraite en 2017, Aki Kaurismaki revient à la caméra pour Les Feuilles mortes, une suite à sa trilogie des travailleurs dont il avait mis un terme en 1990 avec La Fille aux allumettes. Ce retour dénote d’un amour pour le cinéma dont le réalisateur nous partage avec son nouveau long-métrage. Cette comédie dramatique finlandaise est sortie au cinéma le 20 septembre 2023.

Les Feuilles mortes | Alma Poysti | Diaphana Distribution
Les Feuilles mortes | Alma Poysti | Diaphana Distribution

Déprime finlandaise

Avec Les Feuilles mortes, Aki Kaurismaki fait appel à un cinéma qu’il aime profondément : celui du néoréalisme italien et de la nouvelle vague. Le réalisateur finlandais nous transporte non pas dans un Helsinki idéalisé, mais dans celui des ouvriers où se côtoient chantiers et bars.

Ce cadre spatio-temporel offre une teinte très froide au métrage qui est d’autant plus marquée par son immobilisme et sa rigidité, qu’ils soient en termes de réalisation ou de direction d’acteur. S’accompagne à ces deux aspects un « gris » constant dans les décors et dans le cœur des personnages qui forment un ensemble plus que déprimant.

Pour Ansa et Holappa la vie n’est que travail, transport, maison, bar et ainsi de suite. Ils vivent un quotidien où leur humanité est réprimée. Néanmoins, ils vont la retrouver en se rencontrant, leur enveloppe de robot se brisant peu à peu.

Le Soleil percant les nuages

L’idylle entre Ansa et Holoppa est ce qui va leur permettre de sortir de leur quotidienneté. Dans Les Feuilles mortes, l’amour triomphe de l’entrave émotionnelle de la société. Ansa et Holappa fuient un présent grisâtre et rigide n’attendant d’eux que de rentrer dans le rang.

En offrant de l’amour pour un chien pour l’une, et en arrêtant de boire pour l’autre, ils vont éloigner les nuages qui les entourent bien que le monde ne souhaite cependant pas de cet amour. De plus, à cause de cette société froide, ils ne savent pas comment exprimer leurs émotions, toutefois c’est la raison pour laquelle cette histoire est extrêmement touchante.

Les deux expriment ce qu’ils ressentent en cherchant à se voir là où ils ont eu leur premier rendez-vous : dans un cinéma. Nous sommes ainsi entre Les Lumières de la ville et Les Temps modernes, c’est-à-dire dans un amour simple, la référence aux films de Charlie Chaplin étant explicite avec le nom du chien, ce dernier étant par ailleurs un symbole de fidélité.

Les Feuilles mortes | Jussi Vatanen , Alma Poysti | Diaphana Distribution
Les Feuilles mortes | Jussi Vatanen , Alma Poysti | Diaphana Distribution

Le monde…

Le présent n’offre plus d’espoir, alors les personnages retournent dans le passé. Les Feuilles mortes est un métrage anachronique. En dehors de la modernité des outils au travail, le mobilier, les objets et les affiches de films viennent d’un autre temps.

Les personnages se transportent dans une époque qu’ils n’ont pas connus, celui des années 1950/1960, fuyant un monde qu’ils ne connaissent trop bien. Toutefois, ils se bercent d’illusions car ils viennent eux-mêmes à s’enfermer dans une époque qui ne leur offre aucune perspective d’avenir.

Ainsi, nous opérons presque un retour en URSS avec une tension permanente soulignée par la guerre en Ukraine qui parcourt le film. Le travail de « l’ouvrier » est par exemple surveillé et le moindre écart est puni.

Ansa et Holoppa, en se rencontrant, vont sortir de cette emprise totalitaire. En témoigne leur sortie au cinéma où ils vont prendre The Dead don’t Die pour ce qu’il est au contraire de deux hommes pragmatiques qui rapprocheront le film de Jim Jarmush à du Robert Bresson.

… et le cinéma d’avant

Profondément ancré dans notre monde actuel, Les Feuilles mortes ne montre et n’utilise que des codes anciens. Aki Kaurismaki fait appel à une réalisation surannée se basant essentiellement sur des plans fixes sans mouvements de caméra et de quelques plans larges pour montrer – à l’instar d’un Pasolini – les chantiers et le monde ouvrier.

Nous sommes transportés dans les années 1950, époque où les histoires d’amour étaient tout aussi succinctes, où la religion avait un poids dans ces dernières et où les drames se déroulaient en hors champ. Néanmoins, le code le plus souvent utilisé est celui de montrer un panneau du nom de l’endroit où nous sommes avant de nous le dévoiler.

C’est le cas en particulier du California Pub et du bar Buenos Aires. Les noms de ces deux lieux font évidemment penser au Soleil et à la chaleur sauf que nous n’en avons pas. Dans le cas du California Pub c’est d’autant plus fort que le plan moyen qui suit montre que derrière ce jaune et ce nom se cache le même gris que nous retrouvons partout dans le métrage.

Les Feuilles mortes ne montre que peu de Soleil, mais il réchauffe les cœurs. C’est une œuvre qui revient au cinéma dans sa forme la plus pure. Au temps de l’extravagance, c’est parfois en retournant à la simplicité que nous touchons le plus juste.

Les Feuilles mortes | Jussi Vatanen | Diaphana Distribution
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