Pauvres Créatures – Emma Stone s’éveille philosophiquement à la vie

Pauvres Créatures : Bella est une jeune femme ramenée à la vie par le brillant et peu orthodoxe Dr Godwin Baxter. Sous sa protection, elle a soif d’apprendre. Avide de découvrir le monde dont elle ignore tout, elle s’enfuit avec Duncan Wedderburn, un avocat habile et débauché, et embarque pour une odyssée étourdissante à travers les continents. Imperméable aux préjugés de son époque, Bella est résolue à ne rien céder sur les principes d’égalité et de libération.

AVIS GLOBAL

Note : 4 sur 5.

C’est une réalisation de Yórgos Lánthimos. En l’espace de seulement quelques films, il a su installer son style particulier à Hollywood. Passé maître dans l’art du décalage, de concepts toujours aussi déjantés, mais toujours avec des personnages très premier degré. Il revient en ce début d’année avec son film le plus ambitieux, que ce soit au niveau de son budget ou de ses visuels et thématiques avec Pauvres Créatures. Cette comédie dramatique fantastique américaine est sortie au cinéma le 17 janvier 2024.

Pauvres Créatures | Searchlight Pictures
Pauvres Créatures | Searchlight Pictures

Et Lanthimos créa Bella !

Pauvres Créatures est un patchwork de multiples références au service d’une fable émancipatrice sur le personnage de Bella, joué par la talentueuse Emma Stone. En mixant autant de références que sont Frankenstein, Jules Verne, Candide, le Marquis de Sade ou bien évidemment Le Magicien d’Oz, le film est une ode à tout un univers culturel dont Lanthimos utilise à bon escient pour en faire une œuvre plastiquement unique et au ton provocateur ravageur !

Le récit, tel le Magicien d’Oz, commence dans un élégant noir et blanc, présentant Bella, sorte de bébé Frankenstein dont le monde extérieur semble inaccessible. Ayant pour seule compagnie des animaux modifiés et son père, subtilement appelé Dieu. Bien évidemment, en évoluant progressivement, Bella a soif d’apprentissage et connaît son corps, son esprit et le monde. Comme Dorothy arrivant dans le monde d’Oz, la couleur apparaît lorsque Bella s’émancipe de son paternel et découvre ce qui l’entoure.

Si vous n’avez que très peu entendu parler de ce film, vous ignorez peut-être que Pauvres Créatures n’hésite pas à embrasser ses sujets frontalement. L’émancipation de Bella passe d’abord par des actes purement corporels. Que ce soit la nourriture, dont ses goûts vont peu à peu s’aiguiser, mais tout comme sa démarche, son adresse, les scènes de danse sont incroyables ! Mais aussi découvrir ses plaisirs corporels en expérimentant le sexe, beaucoup de sexe. 

Anatomie des corps et des esprits

Autant dire que si les plus prudes d’entre vous passeront un long moment, le film n’est jamais vulgaire et toujours en adéquation avec son sujet principal, Bella. Le film passe continuellement son temps à déconstruire les clichés de notre société sur la possession que les hommes peuvent avoir sur les femmes, tout comme la façon de concevoir l’idée du don de son corps à autrui. On sait très bien qu’un homme à femme est toujours aussi bien contrairement à l’inverse.

Une des parties se déroulant à Paris aurait même pu donner un livre inversé d’un certain Marquis de Sade du point de vue féminin où l’homme est ridiculisé et moqué, donnant des séquences hilarantes dont seul Lanthimos pouvait amener de cette manière. Emma Stone a d’ailleurs le courage et le mérite de se livrer totalement à son personnage, offrant une performance physique impressionnante.

C’est à ce moment que le voyage de Bella prend une tournure philosophique provocatrice, mais ô combien passionnante. Renversant les codes d’un monde moderne. Bella s’instruit auprès des anarchistes, des socialistes, mais aussi envers des clients d’une maison close que Bella va laisser se réduire à leurs bas instincts sans réellement porter un jugement de valeur. Vivre ce récit à travers le point de vue seul de Bella reste la plus grande force du film tant le personnage rayonne par son esprit candide mais lucide.

Pauvres Créatures | Searchlight Pictures
Pauvres Créatures | Searchlight Pictures

Un film trop impressionnant techniquement ?

Le reste du casting est comme toujours chez Lanthimos exquis, cela fera du bien de voir un Mark Ruffalo dans un rôle un brin intéressant. Dans le rôle du dandy manipulateur tourné en ridicule tout au long du film, reflétant la bêtise propre de l’homme possessif et toxique. Mais c’est surtout Willem Dafoe en Dieu, une prestation marquante grâce à un maquillage impressionnant et un rôle extrêmement ambigu qui fascine autant que ses créations hybrides, que Mars Attack n’aurait pas renié. 

Comment ne pas tomber en amour devant certains visuels ? Le film regorge d’idées de design, d’idées de mise en scène, peut-être un poil trop par moment. Lanthimos ayant déjà beaucoup expérimenté le fisheye, cet effet grossit fortement comme si le spectateur errait dans la scène tel un voyeur omnipotent. Sans doute une trop grosse utilisation de ce procédé qui atténue sensiblement ce dernier tout en devenant un peu putassier et facile. Cela reste du chipotage au vu de la beauté de certains plans que Pauvres Créatures nous offre et l’abondance de cinéma offert par Lanthimos.

Mention spéciale à la bande originale totalement folle de Jersink Fendix, décousue, dissonante et toujours en adéquation avec l’état d’esprit du film et du personnage de Bella. Techniquement, le film est en tout point irréprochable, notamment dans ses effets spéciaux nombreux qui ne sont jamais pris en défaut. Un bien bel écrin…

Pour conclure

On ne peut nier le talent de conteur décaler du cinéaste grec. Lanthimos offre un film sous forme d’aboutissement d’un style commencé avec Canine et perfectionné au fur et à mesure jusqu’à ce Pauvres Créatures. Film multiple, passionnant et généreux, il risque de marquer ce début d’année par une volonté d’en mettre plein les yeux et la tête à ses spectateurs. Jetez vous dessus et vivez ce conte philosophique provoc sensationnel !

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