Cannes 2025 – On a vu « La Venue de l’Avenir », un petit Klapisch qui remonte le temps !

La Venue de l’Avenir – Aujourd’hui, en 2025, une trentaine de personnes issues d’une même famille apprennent qu’ils vont recevoir en héritage une maison abandonnée depuis des années. Quatre d’entre eux, Seb, Abdel, Céline et Guy sont chargés d’en faire l’état des lieux. Ces lointains « cousins » vont alors découvrir des trésors cachés dans cette vieille maison. Ils vont se retrouver sur les traces d’une mystérieuse Adèle qui a quitté sa Normandie natale, à 20 ans. Cette Adèle se retrouve à Paris en 1895, au moment où cette ville est en pleine révolution industrielle et culturelle. Pour les quatre cousins, ce voyage introspectif dans leur généalogie va leur faire découvrir ce moment si particulier de la fin du XIXe siècle où la photographie s’inventait et l’impressionnisme naissait. Ce face à face entre les deux époques 2025 et 1895 remettra en question leur présent et leurs idéaux et racontera le sens de : La venue de l’avenir.

Avis Global

Note : 3 sur 5.

À l’occasion de la 78e édition du Festival de Cannes, nous avons pu assister à la présentation du nouveau film de Cédric Klapisch, après « En Corps« . Cette fois-ci, le réalisateur s’attelle à un projet autrement plus ambitieux, en voulant mettre en scène un film d’époque ! Un genre particulier, qui a pour but de nous replonger dans une époque passée, et dans le cas présent, à la fin du 19e siècle, où Adèle, part à la rencontre de sa mère dans un Paris où se côtoient les artistes impressionnistes, les photographes modernes, et peut-être aussi une voie vers l’avenir ? Dans ce métrage à la croisée des époques, est-ce que Cédric Klapisch parvient à dresser une fresque familiale intemporelle ? Ou bien est-ce une regrettable machine à remonter le temps ?

« La Venue de l’Avenir » est un projet qui est loin d’être déplaisant, mais qui reste un peu superficiel. Klapisch parvient à bien embrasser le film d’époque, et son cahier des charges, avec ses costumes soignés, ses décors (un peu factices) qui nous replongent dans le Paris d’antan. Dans la même veine, son casting XXL s’en sort avec les honneurs, parvenant à livrer des performances honnêtes, voire plaisantes pour certains, malgré une caractérisation parfois un peu légère. Malheureusement, sa mise en scène trop sage, son rythme trop irrégulier, et ses va-et-vient dans les temporalités, ne permettent pas au métrage de prendre vraiment corps. Il n’en reste qu’un agréable visionnage, où cette quête de filiation ne déplaît pas, à défaut de nous marquer véritablement.

Un récit familial qui traverse les âges, sans nous transcender

Ici, Klapisch nous entraîne dans une enquête de filiation, une quête généalogique. Alors que nos personnages se découvrent grâce à un travail de généalogie ordonnée par une entreprise pour racheter un domaine, cette nouvelle grande famille, qui doit apprendre à se connaître, va aussi faire un bond dans le passé pour reconstituer la vie de son aïeule, Adèle. Le pari est double donc, car le métrage se retrouve à être un film d’époque, mais aussi une fresque familiale qui doit retrouver son passé, pour peut-être leur permettre de mieux comprendre leur avenir. En cela, le film tente d’opérer un jeu d’équilibriste, entre les époques, mais aussi entre les genres !

Sur le film d’époque, le métrage parvient à relever le défi avec les honneurs ! En effet, la reconstitution est dans son ensemble plutôt soigné, tout en restant relativement simple dans sa démonstration et son exploration de l’époque. Mais les costumes apparaissent soignés, nous permettant de mieux s’immerger dans ce Paris d’époque, les robes sont travaillées, les habits plutôt bien détaillés… Le point est accordé de ce côté. Il en va de même pour les décors, qui nous offrent une petite virée dans le passé. Même si les lieux exposés sont limités, ces derniers parviennent à créer l’illusion d’un retour dans le temps. Et cela malgré quelques limites techniques visibles, notamment dans l’usage de fonds numériques, qui doivent se mélanger à des décors réels en studio, sur ces scènes le résultat bave un peu, et fait exploser toute l’artificialité du projet.

Cela n’est pas dérangeant outre mesure, tant l’ensemble du métrage est soigné, propre… Mais peut-être trop sage ? On peut se le dire, et c’est un peu dommage. Et si Klapisch s’était emprisonné dans le genre du film d’époque, pour rester à un cadre très classique de réalisation ? C’est la question que l’on peut se poser, tant l’ensemble du métrage peine un peu à nous montrer la touche du réalisateur, laissant place à un enchaînement de scènes propres, mais tutoyant l’académique par instants. Pour autant, le film possède quelques scènes qui auraient pu nous émouvoir, mais la caméra, trop coincée dans sa volonté d’immobilité, peine à faire exploser sa poésie visuelle. Et ce n’est pas forcément le montage qui parviendra à nous faire changer d’avis, tant ce dernier ne permet pas de réellement aux scènes de prendre racine. Tout est millimétré, mais se transforme assez vite en un résultat un brin aseptisé, où toute possibilité d’attachement, ou de développement est empêchée. Quel dommage quand on voit le soin apporté à la reconstitution, et aux moyens déployés pour donner vie à la grande fresque de Klapisch !

Un récit trop en surface… pour un projet qui s’efface ?

C’est ici qu’apparaît la deuxième interrogation : et si le projet était trop grand pour le film ? C’est une question qui pointe le bout de son nez au fur et à mesure, tant on se rend compte que le tout avance à une vitesse folle. Pourtant, la grandeur se fait ressentir, ne serait-ce que dans sa volonté de faire cohabiter deux époques distinctes, avec sa distribution de personnages propres. Dès lors, il est évident que du temps est nécessaire pour permettre aux temporalités de prendre en profondeur, aux personnages de se construire, et aux thématiques de nous atteindre.

Mais alors, que se passe-t-il ici ? Pourquoi le récit ne parvient pas totalement à prendre son envol ? Peut-être de par son ambition trop grande, et un récit qui ne laisse jamais le temps. Que ce soient les aventures d’Adèle (Suzanne Lindon) et de ses acolytes, Anatole (Paul Kircher) et Lucien (Vassili Schneider), ou bien la formation de cette famille fragmentée, et leur quête du passé. Rien ne prend vraiment forme, et alors que la réalisation peine à s’envoler, le récit, lui, reste en survol permanent. Les intrigues se déroulent sans s’inquiéter du spectateur et de son besoin d’attachement, sans que cela ne soit bâclé pour autant, le scénario semble constamment jouer sur la ligne du « juste ce qu’il faut », comme si le film ne souhaitait pas trop s’attarder, pour ne pas s’éparpiller. Mais le résultat nous laisse quelque peu de marbre, malgré quelques scènes qui nous font décrocher un joli sourire, et qui démontre que le métrage peut insuffler une dynamique quand il le souhaite, dommage que cette volonté ne soit que passagère.

Ce manque de profondeur se retrouve également dans l’écriture de ses personnages, et cela, malgré les prestations solides offertes par ce casting qui réunit les talents du moment. De Suzanne Lindon qui dynamise son époque, Paul Kircher en amoureux moustachu, ou bien une Cécile de France en experte d’art à l’accent bourgeois… Oui, le casting est convaincant, mais ces figures semblent hélas ne rester que des façades, loin d’avoir suffisamment de moments pour leur permettre de vraiment grandir. Dans ce grand bal, les personnages peinent à trouver leurs rythmes, n’ayant pas suffisamment de place, pas assez de temps, et doivent cohabiter avec le reste des personnages, et épouser ce montage qui va trop vite. En élèves appliqués, ces derniers s’exécutent, et ne profitent que de brefs instants pour essayer de briller, mais sans parvenir à atteindre le firmament.

Au final, on passe ? Ou on fonce ?

« La Venue de l’Avenir » n’est pas un moment déplaisant, au contraire ! On se plaît à rentrer dans ce Paris de l’époque, à suivre cette petite bande qui parvient à nous offrir des bons moments… Oui, le film relève son pari du film d’époque, et oui il remplit à merveille son rôle de divertissement entre comédie et émotion, mais Klapisch peine un peu à transcender son projet, et reste assez timide dans sa mise en œuvre. Malgré quelques scènes qui parviennent à trouver donner un peu de souffle, comme la découverte des correspondances, une cérémonie familiale mystique… L’ensemble s’efface relativement vite, sous le poids d’une mise en scène bien sage. Si on souligne l’ambition de vouloir porter à l’écran une fresque aussi grande, on aurait aussi aimé que cette dernière parvienne à trouver son harmonie.

Hélas, il n’y parvient que très peu, tant il se laisse emporter par son propre emballement, laissant le sentiment que le métrage ne reste que très artificiel, que ce soit dans son récit, comme dans ses décors.

En salles le 21 mai 2025 | 2h06 | Comédie dramatique

De Cédric Klapisch | Par Cédric Klapisch, Santiago Amigorena

Avec Julia Piation, Suzanne Lindon, Paul Kircher, Vassili Schneider…

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