Le Plongeur : Stéphane, 19 ans, rêve de devenir illustrateur. Accro aux jeux d’argent, il s’engouffre dans une spirale infernale. Endetté, sans appartement, fuyant ses amis à qui il doit de l’oseille, il trouve un job de plongeur au restaurant La Trattoria pour s’en sortir.
LE PLONGEUR
Le Plongeur est ce que nous pourrions dire une plongée à la fois dans un souvenir commun et personnel. Adapté du roman éponyme de Stéphane Larue, le film de Francis Leclerc met les mains aussi bien dans le lavabo d’une époque que dans la perception de celle-ci par l’auteur. La cuisine montréalaise du début des années 2000 offre des plats viciés au goût nostalgique très prononcé. Ce drame québécois sort au cinéma le 3 janvier 2024.

Trouver sa meute
Dans Le Plongeur nous suivons Stéphane – prénom du romancier –, un jeune louveteau arrivant à Montréal à la recherche d’une meute à rejoindre. Dans sa quête, il va être dévoré par tout ce que cette nouvelle ville lui offre : l’alcool, les bars et surtout les machines à sous, là où l’assimilation en loup se fait via une surimpression maligne.
S’il pose ses pattes sur ces machines, ce n’est pas pour rien. L’étudiant est seul et perdu. Cela va évidemment le mener vers l’addiction, toutefois, il ne chasse pas l’argent mais plutôt le temps. Le bar est le seul endroit où il ne réfléchit plus et où il perd la notion du temps.
À vrai dire, Stéphane se terre aussi autre part : dans la cuisine de la Trattoria. Son job de plongeur dans ce restaurant italien ne change pas vraiment de son quotidien. Qu’il soit devant une machine à sous ou devant un lave-vaisselle, le jeune homme perd la notion du temps. La seule différence se fait dans le montage. Au bar, les plans sont vifs ; en cuisine, ils sont lents. Dans les deux lieux le temps passe plus vite même si dans le deuxième cas l’étudiant est dans une meute.
Le diable sur l’épaule
Stéphane est un jeune en perte de repère ayant besoin d’un mentor. Il en trouve un au restaurant en la personne de Bebert tandis que dans la vie courante ce rôle incombe à son cousin Malik. Ces deux personnages représentent le futur du jeune homme.
En étant en cuisine, il plonge dans des affaires pas nettes et risque de ne pas pouvoir sortir la tête de l’eau. À l’inverse, en sortant de cette pièce, il peut poursuivre une vie honnête. Tout au long du métrage il va rester au restaurant.
Bien qu’il soit chic, nous comprenons qu’il comporte une salle infernale. La première séquence en cuisine souligne parfaitement grâce à son ralenti le chaos ambiant. Les cuisiniers sont tels des diablotins qui préparent des plats pour les anges de la salle à manger.
Ce côté s’accorde avec la nature de Stéphane car, en côtoyant ses collègues, il accumule les péchés dont le jeu et le mensonge. En se réfugiant dans les machines et dans les casseroles, le jeune homme s’enferme dans le mensonge.

Un goût de nostalgie
Le Plongeur est un retour virevoltant dans les années 1990 et début 2000. Le film possède des tics de réalisation et de montage de cette période tel que le narrateur en préambule qui fige l’écran ou l’humour tiré de sitcom.
De plus, références musicales et cinématographiques se confondent dans une œuvre inspirée du Martin Scorsese de cette époque. Stéphane, ce louveteau arrivant à Montréal, est une sorte d’anti-Henry Hill de Les Affranchis, le jeune homme rencontrant dans la cuisine d’un restaurant huppé une « pègre » extravagante.
Le Plongeur reprend même un élément phare du chef d’œuvre de Scorsese : le plan séquence. Le – faux – plan séquence quand Stéphane part travailler pour Greg – pseudo Joe Pesci – est une référence directe à celui dans Les Affranchis. Henry passe par la cuisine pour arriver jusqu’à sa table tandis que Stéphane fait de la plonge et n’ira jamais en salle.
La confrontation des deux plans séquences montre ainsi la différence qui subsiste entre les deux personnages. D’un côté l’étudiant suit un acolyte de Greg pour vendre de la drogue, alors que le mafieux montre que c’est le chef. Stéphane ne va jamais s’élever comme Henry et rester en cuisine, pourtant des deux ce sera lui qui aura le meilleur destin.
Le Plongeur met les mains dans le lavabo du vice montréalais. Le goût de nostalgie traverse tous les sens sans exception, et nous en redemandons. Ce fall and rise québecois propose une excellente entrée pour cette année 2024, voire même un bon plat tout court.
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